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Surmonter l’héritage familial : deuxième partie

April 13, 2016
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Une histoire personnelle sur le deuil et la guérison, par Trevor Jang

La dépression est vraiment une maladie terrible, faite de rage et de colère dirigées contre soi. Le dégoût de soi est écœurant. C’est un sentiment d’inutilité et de désespoir. La perte de mon père à un si jeune âge m’a obligé à me battre contre ce démon une fois adulte.

J’ai fait face à de nombreux défis dans la société, au cours de ma carrière et dans des conflits avec d’autres personnes. Mais, ce n’est rien par rapport au fait de plonger les yeux dans votre propre abîme et de vous voir, à cinq ans, en train de hurler et de vous noyer dans le flot de vos larmes.

Je continue à persévérer et je gagne en force à chaque fois que je le regarde droit dans les yeux.

À un moment, au cours du chemin, j’ai eu ce sursaut en moi et j’ai arrêté de m’apitoyer sur mon propre sort. La rage et la colère ont cessé de nourrir une dépression et se sont peu à peu muées en ambition. Je suis tombé dans l’abîme, mais j’en suis ressorti par l’autre bout en me sentant plus vivant que je ne l’ai jamais été dans toute mon existence.

Dans la première partie de ce récit, j’ai admis beaucoup des erreurs que j’ai commises en grandissant. Dans cet effort pour surmonter l’héritage de mon père, il fallait que j’admette les erreurs nées de la douleur que j’ai ressentie quand il m’a quitté. Les gens blessés blessent les gens. Et j’ai blessé beaucoup de gens. J’en suis désolé.

Il y a beaucoup de leçons précieuses que je n’ai pas reçues en grandissant sans mon père, comme celle sur le respect, et surtout, le respect des femmes. C’est quelque chose que j’appris non sans peine. La misogynie se cache dans l’ombre des hommes modernes. Sans un bon père qui montre ce que veut dire le mot « respect », les garçons peuvent facilement devenir des hommes irrespectueux et blessants en grandissant. Je m’estime heureux d’avoir réalisé cela très tôt et d’avoir fait des efforts pour travailler là-dessus. Je présente tout de même mes excuses à toutes les femmes à qui j’ai manqué de respect avant d’avoir appris cette leçon essentielle.

Je dois aussi reconnaître que j’ai pris le volant ivre. J’étais ignorant à l’époque, mais ce n’est pas une excuse. Je pense que quelque part, j’espérais que je me tuerais en voiture. Mais j’aurais pu aussi tuer quelqu’un d’autre. C’était une décision irresponsable et autodestructrice qui continue d’avoir des conséquences négatives dans ma vie aujourd’hui. Et la province de la Colombie-Britannique maintiendra un couperet au-dessus de ma tête pendant les prochaines années (et à propos, devoir souffler dans un alcootest avant de démarrer la voiture n’est pas la meilleure façon de continuer la conversation!).

J’ai aussi dû apprendre à pardonner mon père. Il m’a abandonné. Il a préféré la drogue à moi. Il n’a pas su se démerder, il m’a laissé dans la merde. Mais récemment, je me suis fait à cette idée. Il a essayé. Il a vraiment essayé. Il est allé en cure de désintoxication pour moi. Mais en fin de compte, il n’a pas pu surmonter ce qui le dévorait de l’intérieur.

Je suis le fils d’un toxicomane. Mais je suis aussi le fils d’un homme qui m’a aimé. Je suis le fils d’un homme qui aimait tout le monde autour de lui. Je suis le fils d’un homme qui voulait que son entourage soit heureux. Mais, je suis le fils d’un homme qui n’a jamais pu trouver cette source de bonheur en lui.

C’est ma quête, maintenant. Avant, je voulais être comme mon père. J’idéalisais l’homme qu’il avait été. Je trouvais que la toxicomanie, les troubles et le chaos étaient des choses romantiques. Quelque part, je trouvais l’idée de mourir de la même façon que lui terriblement poétique. Après tout, ma grand-mère, sa mère, est morte d’une overdose d’héroïne six mois après son décès. Je pensais que c’était le destin de la famille. Mais maintenant, je sais que je dois briser ce cycle.

Je sais désormais que je suis moi, mais avec les qualités de mon père. Je sais que j’ai son rire et sa voix. Je sais que j’ai sa capacité à faire rire les gens autour de moi, à faire qu’ils se sentent bien. Et je sais que pour ma maman, mes tantes, mes oncles et mon grand-père, la petite lueur qui brille dans mes yeux ramène parmi nous mon père à chaque fois que je suis là. Je sais qu’il vit en moi. Et je sais que son héritage, c’est ma vie, dans laquelle je dois croquer à pleines dents.

Trevor Jang est journaliste pour Roundhouse Radio. 

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