Elijah Harper était beaucoup de choses : survivant des pensionnats indiens, chef, chercheur et conseiller indépendant, politicien parfois controversé, et ministre provincial. Mais la raison pour laquelle il a fait la une des journaux en 1990, c’est qu’il avait brandi une plume d’aigle en signe de protestation et d’opposition à l’Accord du lac Meech. Ce jour-là, il est entré dans l’histoire du Canada.
Originaire de Red Sucker Lake, au Manitoba, il a été pensionnaire à Norway House, à Brandon and Birtle, puis a poursuivi ses études à l’université du Manitoba. Il a été élu chef de la bande de Red Sucker Lake à l’âge de 29 ans. Sa carrière politique a commencé en 1981, lorsqu’il a accédé à la législature provinciale sous la bannière du NPD.
Sa vie politique a connu des hauts et des bas : il a perdu son poste au sein du cabinet suite à une arrestation pour conduite en état d’ivresse, mais a de nouveau été nommé au sein du cabinet quelques mois plus tard. Il a aussi connu des difficultés financières et conjugales, mais il a retrouvé sa voie quand l’Accord du lac Meech a fait son apparition sur les manchettes des journaux du pays.
L’Accord du lac Meech consistait en une série d’amendements à la Constitution canadienne, proposés par le premier ministre Brian Mulroney et négociés avec les 10 premiers ministres des provinces et territoires. L’objectif principal des amendements était de faire ratifier la Constitution par le Québec, qui avait rejeté la Loi constitutionnelle de 1982, et s’était ainsi trouvé exclu de la « famille constitutionnelle » canadienne. L’Accord du lac Meech devait reconnaître le Québec en tant que « société distincte » au sein du Canada.
L’accord avait au départ l’appui de très nombreux Canadiens, mais au fil des ans, l’opposition a pris de l’ampleur, en particulier parmi les fédéralistes, qui pensaient que l’accord affaiblirait les pouvoirs fédéraux, et parmi les Autochtones.
Pour être ratifié, l’accord devait obtenir l’appui des législatures de chaque province et territoire, en plus de l’assentiment du gouvernement fédéral. Harper a entamé des procédures pour retarder la ratification de l’accord au sein du parlement manitobain le 22 juin 1990, date butoir de la ratification, qu’il a ainsi empêchée.
« J’étais contre l’Accord du lac Meech, parce qu’il n’incluait pas les peoples autochtones dans la Constitution. On allait reconnaître le Québec comme société distincte, mais on laissait complètement de côté les Autochtones », avait dit Harper.
« Nous étions les premiers ici, les Premières nations du Canada. C’est avec nous que les colons ont signé des traités quand ils sont arrivés d’Europe, avait-il ajouté. Ces colons et leurs gouvernements ne nous ont pas reconnus en tant que nations; voilà pourquoi nous nous opposons à l’Accord du lac Meech. »